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Que d'effacements, de questions font douter et rejeter, suscitant
les peurs qui interdissent toute altérité et minent la fraternité. |
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Edito
n°- 45
08/05/2022
Thierry Mollard osfs
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Religieu(x.ses) et post modernité
Vous avez dit post modernité
?
De quoi parle-t-on, quand on devise sur la post-modernité?
Est-ce en référence à une philosophie, à un courant ou à une
époque ? Probablement que nous mêlons un peu tout cela !
Rendant cette notion incertaine ou mal définie !
En tout cas l'invitation est constante à regarder les
changements : qu'est-ce donc qui a changé et qui se jouent
dans le macrocosme de nos sociétés comme dans notre petit
monde, à l'échelle de l'homme. Avec un accent particulier de
l'interculturalité en ce qui concerne les instituts
internationaux.
La post-modernité à laquelle font référence certains
sociologues "caractérise l'état actuel de la civilisation
occidentale, dans la mesure où elle aurait perdu confiance
dans les valeurs de la modernité (progrès, émancipation) qui
ont prévalu depuis le XVIIIème ." (Larousse)
Aussi certains n'ont de cesse que de retrouver " les vraies
valeurs" celles, jugées trop vite "valeurs de toujours." Ne
cherchant pas forcément un retour vers le passé mais en
instillant une dose parfois mortifère de nostalgies !
D'autres au contraire participent au délitement du lien
social causés par les nouvelles technologies de la
communication et de l’information, et surtout par le fait
que la science qui devait aussi permettre l’émancipation
n’arrive plus à être légitime, qu’elle est alors considérée
comme un discours parmi d’autres ... Un discours qui a
d’ailleurs été mis en soupçon et donc teinté d'échec.
Pensons par exemple à la promesse nucléaire permettant
d’espérer des prouesses. Mais il y eut une incommensurable
détresse : Hiroshima !
D'autres encore, rêvent d'un monde nouveau, une terre
nouvelle, d'un "renouveau" "de reconstruction", "nouvelle
donne", un "en Marche", "Une Reconquête" "Des Horizons" ...
Et on retrouve au fond du lac comme des épaves, le marteau
et la faucille, la croix de lorraine, le bonnet phrygien,
Marianne... la rose, l'étoile rouge, et tant d'autres
reliques !
Que d'effacements, de questions font douter et rejeter,
suscitant les peurs qui interdissent toute altérité et
minent la fraternité. Les épidémies et le Sida que la
science peine à juguler, les attaques informatiques qui
menacent nos organisations quotidiennes, le réchauffement de
la planète devant lequel seul un sursaut d'âme peut apporter
un espoir, les manipulations génétiques et le développement
exponentiel des armes nucléaires ; que de questions, que de
peurs !
Apposer religieux/ses
(d'anciennes institutions) à post-modernité en dit long sur
la traversée du siècle...
La tradition est défaite, elle suscite méfiance,
désenchantement et rejet... L'individu revendique son point
de vue, singulièrement, au détriment voire à la négation des
instituions, provoquant l'effacement progressif de la
confiance. L'homme est sorti du village global ou l'on
pensait pour lui, pour errer en une planète connectée, tel
un forum permanent mais souvent anarchique et suffisamment
nouveau pour manquer encore d'outils d'évaluations quant aux
témoignages et connaissances que des armées de
"spécialistes" autoproclamés exposent et revendiquent.
La déconstruction est à
l'ordre du jour !
Il s'agit de défaire, décomposer, pour comprendre comment un
"ensemble" fonctionne ! Ce n'est pas nouveau qund l'enfant
démonte son jouet, il sera tenté de le remonter. Il
progresse, même si parfois la reconstruction est en échec
par rapport au model initial.
Pour acquérir véritablement un savoir-faire, il faut le
pratiquer et non pas connaître seulement la théorie, les
dogmes, l'histoire.
À force de forger on devient forgeron pense le sage !
Autrement dit l'habileté vient avec l'expérience. C'est par
l’exercice que l’on acquiert de la compétence.
Comme le dit SFS "Deviens ce que tu es !"
Mais aujourd'hui, c'est aussi en déformant que l'on
devient : que l'on se construit !
Déjà le prophète -et c'est intéressant pour la vie
religieuse de souligner cette marque prophétique- a bien des
outils à sa mallette, "pour arracher et renverser, pour
exterminer et démolir, pour bâtir et planter."
L'enjeu : une présence au
monde pour plus de fraternité et donc de justice.
On
choisit ses amis. On choisit l'association avec laquelle on
veut voir grandir et se développer l'homme. On choisit le
syndicat ou les amis politiques avec lesquels on veut
militer mais on ne choisit pas ses frères. Chacun reçoit
comme frère celui qui lui est donné, et qui est fils d'un
même Père.
Dès lors nous voici à envisager la vie religieuse dans un
triptyque « altérité, sincérité, identité ».
La pauvreté a figure d'altérité : comment se laisser
interpeller par les forces de vie de l'autre ? Il s'agit de
pauvreté qui est ce dépouillement de soi, (quête d'une
sobriété heureuse) qui accepte la richesse de l'autre.
La chasteté a figure de sincérité. Elle concerne la nature
de nos relations, leur authenticité : chacun est conduit à
penser l’autre autrement que comme un étranger, engager
envers tous un profond respect, non parce qu'il serait
respectable en soi ou digne d'amour, mais parce que l’Esprit
œuvre en lui, frère de Christ, mon frère et image de Dieu !
L'obéissance a figure d'identité. Il ne s'agit pas de nous
configurer à un modèle, construit sur des règles
(Constituions et Règles de la vie religieuse) qui serait à
adopter, à imiter, à reproduire, mais de devenir ce que nous
sommes.
Une règle sert à mesurer, les écarts qui varient en moi, les
écarts entre nous, entre tous, les écarts avec l'Evangile de
Christ. Ici s'enracine le dialogue, pas celui qui naît de
stratégies à intérêts, mais ce dialogue né de l'écoute de
l'autre qui ne saurait renoncer à sa propre pensée tout en
se laissant interpeller par les convictions d’autrui,
quelque soient les différences.
Aller jusqu'à l'altérité et passer du "je" au "tu", du
"nous" aux "autres" : accepter ce voyage (sur la fameuse
Haute mer du monde salésien ?) pour s'ouvrir au monde du
ciel et des terres et les aimer. C'est là probablement la
capacité de chacun de
participer à la
création d’un nouveau monde, différent, plus désirable, plus
juste, plus fraternel. |